Ce n'est pas qu'une question financière, loin de là.earl a écrit :j'y comprend rien, si le medoc est vendu sur ordonnance, c'est le prescripteur qui décide, et le pharmaco qui va délivrer, qu'est ce que ça change? Sauf que la marge sur le médoc n'yra pas dans la même poche, les politiques ont besoin d’exister![]()
Aujourd'hui, il y a deux modes de prescription du médicament vétérinaire : la prescription sur visite avec examen clinique et la prescription hors examen clinique.
Lors des visites avec examen: après le diagnostic posé, il est rare qu'on se contente de rédiger ne ordonnance qui peut être délivrée chez nous ou dans n'importe quelle pharmacie d'ailleurs. Le plus souvent on intervient en pratiquant des actes proches de ce qui se fait en milieu hospitalier : perfusion, intraveineuse ou autre qui permettent à l'animal de recevoir un traitement rapide et le plus efficace possible. Comment injecter un antibio si je n'ai plus le droit d'en avoir ni d'en vendre?
Exemple du veau de 3 jours en diarrhée, un classique en hiver le dimanche matin : aujourd'hui, visite à domicile, perfusion de soluté hypertonique de réhydratation, intraveineuse d'antibio car ces diarrhées sont associées à des septicémies dans 80% des cas et délivrance au cul de la voiture de sachet réhydratants, d'antibio per os et injectables (en fonction des germes connus dans le cheptel ou des dernières analyses pratiquées dans le coin)... demain perf de soluté et ordo : démerde toi pour aller trouver un pharmacien qui a en stock les médocs nécessaires : un veau en septicémie de moins de 5 jours décède en moyenne en 12h de temps faute de soins appropriés
Le second principe de prescription hors examen clinique est en place depuis 5 ans et a permis de formaliser une pratique habituelle depuis toujours : il existe certains médicaments dont des antibiotiques que j'ai le droit de délivrer à la clinique à un client éleveur sans que je consulte l'animal malade à la condition qu'une visite annuelle ait été pratiquée au cours de laquelle les soucis récurrents ont été abordés et pour lesquels une solution "classique" a été fournie sous forme de protocoles de soins. Il faut que je puisse justifier aussi de visites régulières dans cet élevage. Je ne vends donc jamais de médicaments nécessitant une prescription à des clients inconnus ou de passage!
Exemple de la vache laitière qui boîte à cause d'un panaris : aujourd'hui l'éleveur passe au cabinet, il peut se voir prescrire un antibio sans qu'on voit la vache si on a parlé des soucis de panaris au cours du bilan annuel. Je lui prescrit son médoc et il repart avec et pique sa vache. Pour ça il n'a vraiment pas besoin de payer un déplacement de véto et une visite, c'est très classique et très formalisé. Demain il fait quoi? Quel pharmacien va lui délivrer puisque si il ne passe pas chez nous il n'aura pas d'ordo? Quel conseil va-t-il recevoir?
L'autre problème réside dans la particularité physiologique de chaque espèce... déjà aujourd'hui on récupère régulièrement des chats intoxiqués par des anti-puces pour chien. Les pharmaciens savent-ils que le paracétamol est mortel à dose minime sur le chat? Etc...
Les pharmaciens connaissent-ils les LMR? Quid des temps d'attente pour les compétitions équines?
Pour une pratique classique de médecine canine ou féline je suis d'accord que ça ne changera rien, surtout au début avec deux types de molécules retirées. Mais il ne faut pas oublier que les vétos sont aussi radiologues, chirurgiens, dermato, pédiatres... et quand on hospitalise on a aussi besoins de certains antibio injectables. Quant aux ruraux dont je fais partie, c'est tout le service actuel qui risque de disparaître, pas à cause de deux types de molécules, mais parce que c'est le début du découplage qui va irrémédiablement mener à la perte de tous les antibio puis des autres médocs dont évidemment nous tirons aussi un revenu. A terme c'est l'élevage français qui pâtira du système avec moins de vétos en campagne, des délais d'intervention plus long et l'obligation de courir en pharmacie pour obtenir une partie de la prescription. Le plus grave est que le véto de campagne est très souvent sollicité par l'état lui-même en cas de crise sanitaire majeure : Qui a visité tous les poulaillers de France, même les plus petits et les plus cachés lors de la grippe aviaire? Qui a procédé à tous les relevés et aux abattages des cheptels lors de la vache folle? Qui continue a exercé une surveillance active contre la tuberculose en recrudescence ou contre la brucellose?
Ca ne me dérange pas que le pharmacien vende du médoc véto, c'est déjà le cas... mais ça me dérange de ne plus pouvoir rendre service à mes clients et de devoir me séparer d'une partie de mon personnel à moyen terme à cause d'une décision arbitraire et non justifiée scientifiquement.