Ton cas me touche, ça casse un peu les préjugés "chômeur/branleur/profiteur", même si ça existe aussi, le problème, c'est de faire la différence ...
Alors je vais te raconter mon histoire, peut-être que ça pourra te donner des idées.
J'ai bossé 22 ans à mon compte dans le petit commerce, après 3 ans de boulot chez un géomètre en temps qu'opérateur. Au début, j'ai gagné beaucoup de tunes, et puis, c'est devenu de plus en plus dur, l'heure n'est plus aux petits commerces, pourtant, je me suis battu, diversifié, etc. Je bossais 10 (voir plus parfois) heures/jour sur 6 jours, mais c'était pas encore assez, je voyais passer beaucoup de pognon, mais, une fois tout le monde servi, il restait de moins en moins. Et pis ma femme en a eu marre de mes horaires, d'être toujours seule le samedi, etc., et elle s'est tirée avec un collègue de sa boite. La même année que le divorce, j'ai eu droit à un redressement fiscal, la brave inspectrice qui a traité mon cas, je la reverrais aujourd'hui, je l'embrasserais ! Elle m'a rendu un fier service.
J'ai décidé que ça suffisait, que j'étais en train de passer à côté de ma vie, et j'ai commencé à regarder ce que je pouvais faire. Repartir en temps qu'opérateur, j'aurais pu, avec une grosse remise à niveau, mais les salaires étaient toujours aussi ridiculement bas, et ça ne me branchait pas. Un copain ambulancier venait de se faire embaucher (à 48 ans) comme conducteur de bus, et le salaire était correct, donc, je me suis dit, pourquoi pas. J'ai fait un dossier fongecif, c'est chiant, mais faut pas lâcher le morceau, ils ont fini par l'accepter et par financer mon permis transport en commun. Je ne pouvais pas me permettre de stopper mon activité, donc, j'ai programmé un stage de formation sur mes vacances, puis j'ai fini en y allant que quelques heures par jour, et encore, que lorsqu'on faisait de la conduite en ville, le gars de l'auto-école a été sympa, comme on était pas nombreux, je m'intégrais au stage quand je pouvais, et j'essayais de rattraper le reste. J'ai eu mon permis du 1er coup, en même temps que les autres, coup de bol, j'étais nettement moins à l'aise que les autres avec le gabarit du véhicule.
Une fois le permis en poche (je bossais toujours dans mon commerce), je me suis pointé à la boite de TC de la ville, j'ai demandé à l'hôtesse d'accueil comment il fallait faire pour postuler pour un emploi. Elle m'a donné un dossier à remplir, et j'ai suivi le cursus de sélection, on était nombreux, mais j'avais un avantage, je savais parler et j'avais un bon contact avec les personnes, je suis à l'aise dans presque tous les milieux, le commerce, ça aide, pour ça. Dans tous les entretiens, ce qui compte, c'est la motivation, et montrer que tu as bien cerné le poste. Et j'ai été pris, sélectionné avec 3 autres sur 300 dossiers de candidature et 60 personnes retenues pour passer les tests. Au risque d'en choquer quelques uns, ça m'a paru assez facile, à l'époque ...
J'en viens à ton cas (voir peut-être pour d'autres), il y a régulièrement des embauches dans ma boite, comme, je pense dans tous les boites de TC, ne serait-ce que pour compenser les départs en retraites et les démissions (on est 450 conducteurs). Tout le monde peut le faire, mais désormais, en plus du permis TC, il faut une formation initiale, donc, c'est bien de faire un Fongécif, car ils peuvent t'aider financièrement durant cette formation qui dure 3 mois. Autrefois, dans ma boite, ils faisaient même des sessions en embauchant des gens (au chômage) sans permis TC, et ils les formaient, mais avec la crise, je crois que ce n'est plus d'actualité. Faut être zen et responsable, accepter de travailler certains week-end et certains jours fériés, on travaille en continu (quand on est pas en grève

), comme la plupart des services publics (police, hôpitaux, pompiers etc.). Mais, contrairement à beaucoup de services publics, il n'y a pas d'âge maximum, ils embauchent régulièrement des gens assez âgés, pour une raison tout simple : les jeunes, avec leurs contraintes familiales, ils acceptent mal les horaires, c'est pas toujours facile de commencer à 5H du mat ou de finir à 22H, mais on a rien sans rien. Le salaire tient compte de ces impératifs, je peux donner mon salaire, je n'ai aucun souci avec ça, mais il faut bien comprendre que c'est toutes primes confondues, que tu bosses parfois en heures de nuit (après 21H ou avant 6H), un samedi, un dimanche ou un jour férié (Noël et 1er janvier etc.), comme on est mensualisés, c'est la même somme. Je vais donner le chiffre annuel, ce sera plus clair, l'année dernière, j'ai du déclarer un peu plus de 26.000€ (avant déductions), un chauffeur débutant doit tourner dans les 24.000€/an, mais ça dépend des réseaux et des villes. A la ratp, ils sont mieux payés, je crois.
Faut pas se focaliser avec les agressions, c'est les journaleux qui ne parlent que de ça, mais perso, en presque 15 ans de boite, je n'ai eu que des insultes verbales, ça, par contre, faut être blindé. En même temps, quand on m'a proposé de conduire le tramway, j'ai préféré laisser la place aux plus jeunes, j'ai répondu que, de ne plus me faire traiter "d'enc**é", ça me manquerait trop

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Voilà, pour ceux qui ne sont pas très loin d'une ville assez importante, ça peut être une piste, tout le monde peut le faire, si affinités, faut juste comprendre que c'est un métier de service, tu es au service des gens, la conduite, c'est important, mais ce n'est pas l'aspect le plus délicat du métier. Selon le nombre de conducteurs, chaque année, il y a un nombre d'embauches, pour nous, c'est souvent au minimum une dizaine, parfois plus. Et si tu fais ton taf, on te fout la paix, t'es relativement autonome, même si on a de plus en plus tendance à être fliqué ...
Encore aujourd'hui, et bien que ça en choque beaucoup, travailler 35 heures, quand on a été habitué à bosser 60h/semaine, c'est cool. Pour le pognon, bin, je fais avec, c'est pas terrible, mais je me débrouille, je suis plus heureux aujourd'hui qu'il y a 20 ans, le temps libre, ça n'a pas de prix ! Je gueule pour le pognon, mais, on me donnerait 40.000€ et rebosser 60 heures, je ne le ferais pas, du moins, à mon âge, à 20 ans, peut-être ...